Le changement climatique a des conséquences directes sur l’ensemble du cycle de l’eau, impactant notamment les ressources en eau souterraine et de surface. En hydrogéologie, la compréhension des effets du changement climatique est essentielle pour anticiper l’évolution des débits des rivières et la disponibilité de l’eau potable.
Découvrez les projections climatiques en France basées sur les recherches des projets DRIAS et DRIAS-EAU. Ces travaux mettent en avant les scénarios envisagés et leurs impacts sur la ressource hydrique, illustrés par des études de cas détaillées.
Le climat à venir est notamment fonction des émissions ou concentrations de gaz à effet de serre et d'aérosols dues aux activités humaines. Pour simuler l’évolution du climat, il est nécessaire d’émettre des hypothèses sur l'évolution de ces émissions, ainsi que sur celles de la population mondiale et des sociétés. Ces hypothèses sont appelées « scénarios » SSP pour « Shared Socio-economic Pathway ». Les nouveaux scénarios utilisés pour le sixième cycle du GIEC (Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat) tiennent désormais compte à la fois des émissions de gaz à effet de serre et des contextes socioéconomiques (cf. figure 1).
Le projet DRIAS (Donner accès aux scénarios climatiques Régionalisés français pour l’Impact et l’Adaptation de nos Sociétés et environnements) fournit des projections climatiques régionalisées, pour l’ensemble du territoire métropolitain. Les projections sont données sur une maille de 8 km de côté. Chaque projection est issue d’un modèle global de climat qui est lui-même utilisé pour effectuer des simulations à haute résolution avec un modèle régional (similaire aux modèles utilisés pour les prévisions météorologiques opérationnelles).
Ces projections d’impacts du changement climatique ont ensuite été utilisées pour apprécier leurs effets sur la ressource en eau. Il s’agit du projet DRIAS-EAU qui se base sur une chaine de modélisations composée (cf. figure 2) :
Des trajectoires de forçage radiatif, c'est-à-dire des scénarios d'évolution des quantités de gaz à effet de serre émises au cours du 21ème siècle ;
Des modèles de circulation générale (CGM), qui simulent le climat global sur des mailles de calcul étendues ;
Des modèles climatiques régionaux (RCM), qui simulent le climat sur des zones plus restreintes et sur des mailles de calcul plus fines;
D’un ou des modèles de descente d'échelle et de correction de biais, visant à corriger les défauts des simulations climatiques en affinant la résolution spatiale ;
De nombreuses incertitudes subsistent à chaque étape de ce processus :
Au total, 3 scénarios climatiques (RCP2.6, RCP4.5 et RCP8.5) ont été simulés à travers 17 couples de modèles régionaux (GCM/RCM) et deux méthodes de correction de biais, aboutissant à 106 simulations climatiques.
Face à ces variations de résultats, la question du choix des modèles se pose. Plutôt qu’une approche purement statistique, les experts nationaux préconisent l’utilisation de 4 « narratifs » pour le scénario SSP5-8.5 (cf.figure 3).Ce scénario représente l’hypothèse la plus pessimiste, où aucune politique climatique restrictive ne serait mise en place (« business as usual »), c’est à dire à une estimation de la borne supérieure en termes de changement climatique. Il s’agit par ailleurs du scénario retenu par l’État français dans le cadre du Plan National d’Adaptation au Changement Climatique (PNACC), adopté le 10 mars 2025. Les projections associées permettent de décrire quatre trajectoires climatiques plausibles et contrastées pour la fin du siècle.
Par exemple, les résultats des modélisations du projet Explore2 et du scénario SSP5-8.5, pour la Garonne à Portet-sur-Garonne (31), indiquent une baisse progressive du débit moyen annuel (QA) :
Cette diminution est particulièrement marquée en période d’étiage (basses eaux), avec des réductions estimées entre :
Ces résultats sont beaucoup plus contrastés en période de crues avec par exemple, une augmentation de la fréquence des crues de période de retour de 10 ans, très variable selon les modèles et les scénarios, et comprise en 0,3 fois l’actuel (c’est-à-dire une forte baisse de fréquence) et 2 fois l’actuel (c’est-à-dire une forte hausse de fréquence) (cf. figure 6).
Ainsi, les projections pour le scénario SSP5-8.5 indiquent :
Ces résultats, bien que soumis à de nombreuses incertitudes, constituent des outils essentiels pour l’anticipation et l’adaptation des usages de l’eau face au changement climatique.